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RÉSUMÉ

UN

DEUX

TROIS

QUATRE

CINQ

SIX

SEPT

HUIT

NEUF

DIX

ONZE

DOUZE

TREIZE

QUATORZE

QUINZE

SEIZE

DIX-SEPT

DIX-HUIT

A propos de l’Auteur

Copyright

LA BELLE MORTELLE DE SAMSON

(Vampires Scanguards – Tome 1)

PAR

TINA FOLSOM

 

Traduit par Agathe Rigault

Revu et corrigé par Ophélie Vernet

La Belle Mortelle de Samson

Copyright © 2011 Tina Folsom

RÉSUMÉ

 

Samson, le vampire célibataire, ne peut plus la lever. Même son psy ne sait pas comment l’aider. Mais tout change lorsque Delilah, la belle mortelle et audit, tombe dans ses bras après ce qui ressemble à une banale agression. Soudain, les problèmes physiques du vampire s’évanouissent, du moins tant que Delilah se trouve dans ses bras.

Les scrupules du vampire de mettre Delilah dans son lit disparaissent lorsque son psy avance qu’il s'agit de l'unique façon de résoudre son problème. Pensant que tout ce dont il a besoin est de quelques heures en sa compagnie, Samson se laisse tenter par une nuit de plaisir et de passion.

Cependant, une autre agression contre Delilah et un cadavre plus tard, et voilà Samson qui se retrouve à jongler avec de nouveaux problèmes : non seulement tenter de cacher le fait qu'il est un vampire mais également découvrir les secrets de la jeune femme concernant une personne qui lui veut du mal.

UN

 

« Laisse-moi te sucer. »

La femme vampire tira sur le pantalon de Samson, libéra son sexe mou du confinement de son jean et se mit à le sucer de sa superbe bouche. Alors qu’elle se concentrait sur lui, il se prit à observer les lèvres rouges se resserrer sur sa verge. Elle bougeait de haut en bas, l’humidité de sa bouche lui servant de lubrifiant.

Elle attrapa ses bourses dans le creux de sa main et les serra, en rythme avec ses succions. Elle avait du talent, cela ne faisait aucun doute. Plongeant ses mains dans les cheveux de la femme, il balança ses hanches d’avant en arrière, cherchant une meilleure friction.

« Plus fort. »

Sa requête fut reçue avec enthousiasme, le son des aspirations de la belle emplissant la pièce faiblement éclairée.

D’un regard, il laissa ses yeux balayer le corps féminin à peine vêtu : des courbes appétissantes, de belles fesses et un joli minois. Tout ce qu’il pouvait désirer chez une partenaire sexuelle. Enthousiaste à l’idée de lui faire une fellation, elle avalerait probablement aussi, ce qu’il appréciait tout particulièrement. Mais, ni la forte succion à laquelle elle s’adonnait, ni la sensation de cette langue émoustillante courant de haut en bas sur sa verge ne produisait d’effet. Aucune érection ne semblait en vue. C’était peine perdue ! Rien ne bougeait.

La tête de la femme vampire s’agitait d’avant en arrière, ses longs cheveux bruns frôlant la peau nue de Samson, se mêlant à ses poils pubiens. Mais le corps de ce dernier n’était pas là. C’était comme si elle suçait quelqu’un d’autre que lui.

Samson la repoussa finalement, humilié et frustré. Si les vampires avaient pu rougir d’embarras, son visage aurait été aussi écarlate que les lèvres de sa partenaire. Heureusement, le rougissement était réservé aux humains.

Son sexe s’avérant inutile, il le replaça, en un temps éclair, dans son pantalon et ferma sa braguette. Plus rapidement encore se défit-il de son homologue féminin, son seul espoir étant qu’elle n’apprît jamais son identité. Une bonne chose qu’il se trouvât dans une ville étrangère et non de retour à San Francisco, où il était connu de tous.

Une semaine après cet incident embarrassant, son ami Amaury lui fit une suggestion.

« Essaye juste pour voir, Samson, » insista-t-il. « Tu peux vraiment faire confiance au gars. Il ne pipera mot de l’histoire à personne. »

Son vieil ami ne pouvait être sérieux.

« Un psy ? Tu veux que j’aille voir un psy ? »

« Il m’a beaucoup aidé dans le passé. Qu’est-ce que tu as à y perdre ? »

Sa dignité. Sa fierté.

« Si tu me le conseilles, je peux essayer. »

Et c’est ainsi qu’il céda. En désespoir de cause ?

« Et ne le juge pas sur ses apparences. »

Le lieu prêtait à rire. Lorsque Samson entra pour la première fois dans le sous-sol sombre où le psychiatre officiait, il voulut faire marche arrière et s’enfuir, mais la réceptionniste l’avait déjà repéré. Se tenant droite et affichant un sourire mielleux, elle fit ressortir sa poitrine.

Cool, un psy travaillant dans un donjon et affublé d’une Barbie en guise de garde !

« Monsieur Woodford. Entrez, je vous prie. Le docteur Drake vous attend, » l’invita-t-elle de sa voix haut-perchée.

A peine entré dans le bureau de Drake, Samson sut qu’il avait commis une erreur. En lieu et place d’un divan se tenait un cercueil dont l’un des côtés en bois avait été retiré afin qu’une personne vivante pût s’y allonger confortablement, comme s’il se fût agi d’une méridienne.

Le gars devait être un halluciné. Aucun vampire moderne digne de ce nom n’aurait voulu être vu dans un cercueil ! Les vampires de San Francisco succombaient à la tendance et s’adaptaient au style de vie des humains. Les cercueils étaient has-been, tandis que les matelas Tempur-Pedic étaient à la mode.

L’homme rachitique fit le tour de son bureau et tendit la main à Samson, en guise de bienvenue.

« Si vous croyez que je vais m’allonger dans le cercueil, je vous conseille d’y réfléchir à deux fois,  » aboya Samson.

« Je vois que nous avons du pain sur la planche. »

Le médecin parut rester de marbre face à la remarque quelque peu brutale de son patient. Il désigna un fauteuil, lequel semblait confortable, et Samson s’y assit à contrecœur. Le docteur Drake se laissa tomber dans le fauteuil d’en face. L’espace de quelques minutes, Samson bougea nerveusement, les mains cramponnées aux bras du fauteuil, tandis que le professionnel l’étudiait du regard.

« On pourrait commencer ? Je crois que je vous paye à l’heure. »

Tôt dans la vie, Samson avait appris qu’être offensif payait davantage que d’être sur la défensive.

« Nous avons commencé à la minute même où vous êtes entré mais, ça, je suis sûr que vous le savez. »

Le sourire du docteur Drake était tout aussi réservé que sa voix.

Samson plissa les yeux, essayant de passer outre cette réprimande implicite.

« En effet. »

« Depuis quand êtes-vous confronté à ces accès de colère ? »

Les mots utilisés par le professionnel n’étaient pas ceux auxquels il s’était attendu. Il pensait éventuellement entendre une question du genre « Alors, qu’est-ce qui vous amène ici ? », mais il n’imaginait pas être confronté à cet assaut direct sur sa psyché déjà bien abîmée. Avant d’accepter de prendre ce rendez-vous, Samson aurait dû demander davantage d’informations à Amaury concernant les méthodes du médecin.

« Des accès de colère ? Je n’ai aucun accès de colère. Je suis ici pour… Le problème c’est que… Euh, mon problème a à voir avec… »

Bon sang, depuis quand ne pouvait-il plus prononcer le mot « sexe » sans se sentir nerveux ? Il n’avait jamais eu de problème auparavant pour s’exprimer sur des questions d’ordre sexuel. Son vocabulaire incluait un large choix de mots sexuellement explicites qu’il n’avait aucune difficulté à laisser jaillir de sa bouche quand nécessaire.

« Hum hum… »

Le médecin hocha la tête comme s’il savait quelque chose que Samson ignorait.

« Vous pensez qu’il s’agit d’un problème d’ordre sexuel. Intéressant. »

L’homme pouvait-il lire dans les pensées ? Samson savait que certains vampires avaient des pouvoirs supplémentaires. Lui-même possédait une mémoire photographique. Il savait que d’autres pouvaient voir le futur ou lire dans les pensées, mais il était dans l’incapacité d’estimer la fréquence de ces pouvoirs.

Il avait besoin de savoir s’il était désavantagé en présence de cet homme. Hors de question de travailler avec quelqu’un qui pourrait lire dans ses pensées comme dans un livre ouvert, alors qu’il n’avait aucune envie d’être lu.

« Lisez-vous dans les pensées ? »

Drake secoua la tête.

« Non. Mais votre problème n’est pas si rare. C’est plutôt facile de le deviner. Vous montrez des signes de colère extrême et de frustration. »

Il se racla la gorge et se pencha en avant avec vivacité.

« Monsieur Woodford, je sais très bien qui vous êtes. Vous êtes à la tête de l’une des entreprises les plus prospères du monde des vampires, pour ne pas dire la plus prospère. Vous êtes immensément riche et faites-moi confiance, cela n’influencera en rien le montant vous tarifé. »

« Bien sûr que non, » interrompit Samson.

Le charlatan lui ferait payer ce qu’il pensait que son patient était disposé à débourser. Ce ne serait pas la première fois. Samson avait l’habitude de voir les gens essayer d’augmenter leurs prix quand ils savaient qu’il avait les moyens. Mais ils n’essayaient en général qu’une fois. On ne l’escroquait pas sans en assumer les conséquences.

« Et dans le même temps, on ne vous a pas vu en société depuis un moment, alors que votre place est là-bas, à flirter avec de belles femmes. Je suppose que votre rupture d’avec Ilona Hampstead a quelque chose à voir avec ça. »

« Je ne suis pas ici pour parler d’elle. »

Samson laissa échapper un soupir. Il refusait de prononcer jusqu’à son nom. Elle ne tenait plus aucune place dans sa vie, plus maintenant. Et le simple fait de la mentionner lui démangeait les canines, avides d’une violente morsure. En faisant craquer ses doigts, il se demanda si le son pouvait être identique à celui du cou de la femme vampire si celui-ci venait à se briser. Ce ne serait que pure musique à ses oreilles.

« Peut-être pas d’elle, mais de ce qu’elle a fait. Il ne peut y avoir qu’une raison à cela. Et nous savons tous les deux de quoi il s’agit. Donc, maintenant, la question est : allez-vous me faire confiance afin que je vous aide ? »

Les yeux bleus de Drake ponctuèrent sa remarque.

« A faire quoi ? »

Samson décida de poursuivre dans le déni. Cela avait marché jusqu’à présent.

« Mettez cette colère de côté. »

Le médecin était aussi insistant que Samson était têtu.

« Je vous ai dit qu’il ne s’agissait pas d’un accès de colère. »

Un sourire narquois retroussa les lèvres du médecin.

« Oh, moi, je crois bien que si. Quoi qu’elle vous ait fait, cela vous a mis dans une telle colère que vous vous êtes bloqué sur le plan sexuel. Comme si vous ne vouliez plus vous rendre de nouveau vulnérable. »

« Je ne suis pas vulnérable. Je ne l’ai jamais été. Pas depuis que je suis un vampire. »

La vulnérabilité était la dernière chose que Samson voulait ressentir. Pour lui, c’était synonyme de fragilité. Si le médecin ne se montrait pas plus prudent dans ses accusations, le mécontentement de Samson se ferait rapidement sentir. Un combat physique soulagerait peut-être ses frustrations.

« Pas au sens propre du mot. Nous sommes parfaitement conscients de votre force et de votre pouvoir. Mais c’est de vos émotions dont je parle. Nous en avons tous. Nous nous débattons tous avec elles. Certains plus que d’autres. Croyez-moi, mon agenda déborde de rendez-vous pris par nos semblables qui ont besoin d’aide pour faire face à leurs émotions. »

Le psy le regarda. Non, Samson ne pouvait permettre à Drake de devenir si proche. Les émotions étaient quelque chose de dangereux. Elles pouvaient détruire un homme. Il s’extirpa de son fauteuil.

« Je ne crois pas que ça va fonctionner. »

L’étau se resserrant dans sa poitrine témoignait de l’effet des mots de Drake sur lui, même s’il n’était pas prêt à le reconnaître. Même pas à lui-même.

Le médecin se leva.

« Depuis que nous avons commencé à nous adapter, » continua Drake, résolu, « mes consultations médicales ont quadruplé. L’adaptation à la vie humaine a perturbé beaucoup d’entre nous. Nous devons, à présent, faire face à des problèmes sentimentaux que nous avions gardés enfouis des siècles durant. Littéralement. Vous n’êtes pas seul. Je peux vous aider. »

Samson secoua la tête. Personne ne pouvait l’aider. Il devait s’en sortir par lui-même. « Envoyez-moi votre facture. Au revoir, doc. »

Il sortit avec fracas ; le médecin avait touché un point sensible.

De toute façon, le sexe était surestimé. C’était, du moins, ce dont il tentait de se convaincre. Certaines nuits, il croyait en ses mensonges, mais cela ne durait jamais. La vérité était qu’il aimait avoir des relations sexuelles. Beaucoup. Mais cela ne semblait pas fonctionner avec les femmes vampires. Quels que fussent ses efforts, il ne pouvait avoir d’érection.

Il n’avait jamais entendu parler qu’une telle chose fût arrivée à d’autres vampires. De prime abord, la virilité sexuelle faisait partie intégrante de ces derniers. L’impuissance était un concept étranger au monde des vampires. Seuls les humains devenaient impuissants. Si la nouvelle venait à se propager, il perdrait le respect de tous ses pairs. Cela était inacceptable.

Il finit donc par abdiquer et, un mois plus tard, prit un autre rendez-vous dans l’espoir que le charlatan pût faire quelque chose pour lui.

***

Samson cligna des yeux et effaça les souvenirs de ces neuf derniers mois. Ce soir, c’était son anniversaire. Il essaierait de s’amuser.

Il enjamba son fauteuil bergère à oreilles afin d’atteindre le minibar ; ses mouvements étaient fluides et, bien que mince, son corps était grand et musclé.

Il se servit un verre de son groupe sanguin préféré et le vida, d’un trait, comme un humain l’aurait fait avec un shot de Tequila, le sel et le citron en moins. L’épais liquide investit sa gorge et étancha sa soif, émoussant ainsi sa faim d’autres plaisirs. Bien ; aucun autre ne serait satisfait ce soir-là.

Tout comme les deux-cent soixante-dix nuits précédentes.

Non pas qu’il les eût comptées.

Seule sa soif de sang avait été apaisée. Ses autres besoins corporels, temporairement contenus, demeureraient inassouvis. Parfois, Samson nourrissait le désir d’être saoul et de tout oublier mais, malheureusement, être un vampire signifiait qu’il ne pouvait boire comme les humains. L’alcool n’avait aucun effet sur son corps. Pourtant, que n’aurait-il pas donné pour un semblant d’engourdissement à cet instant !

Il avait expressément demandé à ses amis de ne pas lui offrir de cadeau ni de préparer de fête. Bien sûr, il savait que tout cela serait vain, et ce n’était, maintenant, plus qu’une question de temps avant qu’ils ne fussent à sa porte. Comme des barbares maraudeurs, ils envahiraient sa maison, descendraient en raid sa réserve secrète de boissons de qualité, composée principalement de O négatif et lui feraient perdre son temps en lui racontant des histoires qu’il avait entendues une centaine de fois.

Il avait eu droit à une fête surprise lorsqu’il avait atteint le cap des deux cents ans, et ce ne serait pas différent aujourd’hui, alors qu’il célébrait son deux cent trente-septième anniversaire ; avec plus ou moins la même distribution au casting.

Anticipant l’inévitable intrusion dans sa vie privée, il avait enfilé un pantalon noir, assez chic, et un pull à col roulé gris foncé. Hormis sa chevalière, il ne portait pas de bijoux.

La sonnerie du téléphone déchira le silence de la maison. Il regarda l’horloge au mur et vit qu’il était presque neuf heures. Exactement comme il l’avait prévu, les gars étaient en route.

« Oui ? »

« Joyeux anniversaire, mon gars. Ça va à mort ? »

Mauvais choix de mots, vraiment.

« Qu’est-ce que tu nous fais, Ricky ? »

Malgré son héritage irlandais, celui-ci avait adopté de nombreuses expressions californiennes et passait désormais davantage pour un surfeur plutôt que pour l’Irlandais qu’il était en réalité.

« Je voulais juste te souhaiter un bon anniversaire et voir ce que tu faisais ce soir. »

La raison pour laquelle Ricky continuait à faire semblant, ça, Samson l’ignorait complètement. N’avait-il donc pas compris que sa fête d’anniversaire surprise était déjà démasquée ?

Samson alla droit au but.

« Quand est-ce que tout le monde arrive ? »

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« A quelle heure allez-vous me surprendre avec une fête d’anniversaire, les gars ? »

« Comment tu l’as su ? Bon, pas grave. Les gars voulaient être certains que tu étais là. Alors ne sors pas de chez toi. Et si notre autre surprise arrive avant nous, garde-la. »

Pas encore ! Samson aurait dû s’en douter. Il retint sa colère.

« Quand est-ce que vous comprendrez que je ne suis pas intéressé par les strip-teaseuses ? »

Je ne l’ai jamais été et ne le serai jamais.

Ricky rigola.

« Oui, oui… Mais celle-là, elle est spéciale. Ce n’est pas une simple strip-teaseuse. Elle offre quelques extras. »

Les bonus auraient-ils un quelconque effet sur lui ? Samson en doutait.

« Je crois qu’elle pourra faire quelque chose pour toi si tu vois ce que je veux dire. Elle est bonne alors, donne-lui sa chance, ok ? C’est pour ton bien. Tu ne peux pas continuer comme ça. Holly a dit que… »

Samson l’arrêta. Trêve de plaisanteries pour ce soir.

« Tu l’as dit à Holly ? T’es con ou quoi ? C’est la plus grosse commère de tout le milieu ! Je m’étais confié à toi. Comment t’as pu faire ça ? »

Ses narines se dilatèrent et ses yeux se rétrécirent. Avec ses canines, soudainement proéminentes dans sa bouche, il aurait pu effrayer un champion de lutte jusqu’au mardi suivant. Mais Ricky n’était pas un lutteur et avait rarement peur. Il n’aurait même pas été effrayé jusqu’au lundi.

« Fais gaffe à la façon dont tu parles de ma copine, Samson. Ce n’est pas une commère. En plus, c’est elle qui a suggéré la strip-teaseuse. C’est une de ses amies. »

Parfait ! Une amie de Holly. Cela ne pouvait clairement que fonctionner !

Samson était toujours en train de fulminer, mais il était trop tard pour tout annuler.

« Bien. »

Il raccrocha vivement le téléphone sans laisser une chance à Ricky de s’expliquer davantage. Bien ! Maintenant qu’Holly était au courant de son petit problème, bientôt tout le milieu de San Francisco le saurait. Il serait la risée de chaque fête, la cible de chaque blague.

De combien de temps Holly aurait-elle besoin pour propager l’information : un jour, une heure, cinq minutes ? Combien de temps avant que ne démarrassent les ricanements dans son dos ? Pourquoi Samson n’achetait-il pas tout simplement lui-même une page de publicité dans le SF Vampire Chronicle pour lui faciliter la tâche ?

Samson Woodford, le jeune célibataire débonnaire, ne peut pas la lever !

***

Les yeux de Delilah Sheridan lui faisaient mal, mais elle continuait à scanner les rangées de transactions en cherchant quelque chose qui ne se serait pas trouvé à la bonne place. Frottant son cou endolori, elle aurait tout donné pour un massage ou, au moins, faire trempette pendant quinze minutes dans une baignoire, mais ni l’un ni l’autre n’aurait lieu ce soir.

« Café ? »

La voix de John retentit derrière elle.

Elle repoussa une mèche de ses longs cheveux noirs derrière son oreille.

« Non merci. Je veux pouvoir dormir ce soir. J’ai eu des insomnies ces dernières nuits. Je suis probablement encore à l’heure de New York. »

Son regard resta fixé sur l’écran de l’ordinateur.

La nuit précédente, malgré le confortable matelas, elle avait à peine dormi. Et le peu d’heures durant lesquelles elle avait succombé au sommeil, elle avait été perturbée par des rêves qui n’avaient aucun sens.

Le grand bureau spacieux était presque désert, et ils étaient les deux derniers. John Reardon était, pour la branche de San Francisco, le chef comptable de la compagnie nationale pour laquelle Delilah travaillait en tant qu’audit.

« Oui, je vois ce que vous voulez dire. C’est le fait de ne pas dormir dans votre propre lit, c’est ça ? »

John semblait sympathique.

« Ils ne m’ont pas envoyée à l’hôtel et m’ont prêté un appartement de la société. Au moins, de cette manière, je ne suis pas dérangée par le service d’étage. »

Certes, elle était logée dans un confortable appartement qui appartenait à la société, mais qu’est-ce que ça changeait si, de toute façon, elle n’arrivait pas à dormir ? Avant son voyage à San Francisco, elle n’avait jamais eu de problèmes d’insomnie. Au contraire, elle était connue pour être capable de s’endormir n’importe où et n’importe quand, dès qu’elle posait la tête sur un oreiller. Un oreiller ou autre chose, d’ailleurs !

Delilah se frotta les yeux, puis regarda sa montre. Il était neuf heures passées. Elle se sentait presque coupable de travailler si longtemps. John avait insisté pour rester tant qu’elle serait là ; il ne voulait pas la laisser seule dans les bureaux. Elle pensait qu’il ne faisait pas confiance aux audits qui furetaient ça et là et, selon elle, il avait bien raison. Non pas qu’elle appelât cela fureter, puisqu’elle disposait de toutes les autorisations dont elle avait besoin. En fait, elle avait des instructions précises.

Elle n’était pas là uniquement en tant qu’audit, mais aussi pour enquêter sur des irrégularités. Delilah était certaine que John n’était pas au courant de sa seconde fonction. On lui avait dit qu’elle n’était qu’un de ces audits que le siège envoyait de temps en temps.

« Je suis désolée, John. Je suis sûre que vous aimeriez rentrer chez vous, maintenant. »

Elle se retourna pour le regarder. Assis sur le bord de l’un des bureaux, le comptable porta sa tasse de café à ses lèvres. Son costume gris ne lui allait pas, et le col de sa chemise semblait effiloché. Il était plutôt grand et physiquement pas mal pour un comptable. Ennuyeux et terne, mais pas laid.

Il n’appréciait probablement pas le fait de devoir rester si tard au bureau. De toute façon, elle n’en pouvait plus, alors peut-être était-il temps de s’arrêter pour ce soir-là, même si elle passerait certainement la nuit à se tourner et se retourner dans son lit, pour une raison ou une autre.

« Prête ? »

Une lueur de soulagement apparut dans les yeux de John lorsqu’elle hocha la tête. Il n’eut besoin que de deux secondes pour se glisser dans sa veste et attraper son cartable. Il était indéniablement pressé de partir. Elle ne pouvait lui en vouloir, il avait une famille qui l’attendait. Alors qu’elle, pourquoi rentrait-elle à la maison ? Ce n’était même pas sa maison.

Non pas que sa maison eût été plus accueillante que l’appartement de la société. Personne ne l’y attendait. Pas d’homme, peu d’amis, pas même un chat ou un chien. De retour à New York, une fois cette mission terminée, elle sortirait et aurait des rendez-vous galants. Tels étaient ses projets. Des projets excellents qu’elle établissait lors de chacune de ses missions en-dehors de la ville, et qu’elle abandonnait, aussitôt rentrée chez elle. Mais cette fois-ci, elle avait bien l’intention de s’y tenir. Vraiment.

Cependant, pour le moment, tout ce qu’elle voulait se résumait à acheter un plat à emporter et à aller se coucher. John fut assez gentil pour lui indiquer Chinatown, où elle trouverait de quoi s’approvisionner avant de retrouver l’appartement. Même si elle s’était déjà rendue dans le quartier, son sens de l’orientation était bien moins développé que sa capacité à travailler avec les chiffres. De jour, elle parvenait généralement à se débrouiller, mais dans le noir, retrouver son chemin devenait vite cause perdue.

Une bruine ayant commencé à tomber, Delilah ne pouvait traîner dehors trop longtemps. Elle s’engouffra dans le premier restaurant chinois qu’elle trouva. L’endroit était presque vide.

La femme à l’entrée tenta de lui indiquer une table, mais Delilah fit signe de la main que c’était inutile.

« Juste à emporter, s’il vous plaît. »

L’hôtesse lui tendit un menu. Delilah le parcourut rapidement en essayant de ne pas laisser ses doigts s’attarder trop longtemps sur la collante couverture en plastique. La carte offrait un éventail bien trop vaste de choix. De combien de façons différentes pouvait-on cuisiner du bœuf ? Bœuf aux pousses de bambou, bœuf aux champignons, bœuf aux épices. C’en était assez. Elle jouerait la sécurité.

« Je vais prendre le bœuf mongol, avec du riz brun, s’il vous plait. »

« C’est dix minutes pour le riz brun. »

La Chinoise était aimable comme une porte de prison et tout aussi belle. Si elle pensait, qu’avec ce regard, Delilah changerait d’avis et opterait pour du riz blanc, elle se mettait le doigt dans l’œil.

« Ça ira, j’attendrai. »

Delilah s’enfonça dans l’une des chaises en plastique rouge près de la porte. Ce voyage d’affaires était son premier à San Francisco. Travaillant pour son propre compte, elle se contentait, en général, d’opérer des missions sur la Côte Est. Elle la quittait toutefois rarement.

Les vérifications périodiques des statistiques effectuées par le bureau-mère avaient révélé de mauvais ratios au sein de la branche de San Francisco. Il avait donc été décidé de faire appel à quelqu’un qui n’avait jamais eu de contact antérieur avec l’équipe de la Côte Ouest. C’est ainsi qu’une personne extérieure à la société avait été embauchée. Démarche intelligente. Les audits étaient susceptibles de se rapprocher du personnel qu’ils contrôlaient. Un changement régulier de ces derniers était donc généralement une bonne idée.

Si quelqu’un était en mesure de trouver d’où venait le problème, c’était Delilah ; elle était spécialisée dans la juricomptabilité. Certes, ce n’était pas aussi excitant que le travail de la police, mais c’était probablement ce qui s’en approchait le plus dans le monde de la comptabilité, si toutefois une telle chose était possible. Un oxymore pour certains, mais pas pour elle. De plus, elle vivait très bien de ce statut de consultant indépendant.

L’enquête ne devait pas présenter trop de difficultés en soi. Certains ratios entre les actifs et les moins-values ressortaient des graphiques et suggéraient, soit l’incompétence d’une personne, soit de mauvaises intentions de la part d’un employé envers la société. Comment, elle ne le savait pas encore, mais elle le découvrirait rapidement.

Delilah était fatiguée et savait qu’elle avait besoin d’une bonne nuit de sommeil, mais elle craignait aussi d’aller se coucher. Certains de ses anciens cauchemars étaient revenus, de nouveaux s’y étaient greffés. Elle n’en avait pas eus depuis quelques mois mais, dès son arrivée à San Francisco, quelques jours auparavant, ses mauvais rêves étaient réapparus.

En général, c’était toujours les mêmes. La vieille ferme française dans laquelle ils avaient vécu vingt ans plus tôt, quand son père avait accepté une mission de deux ans à l’étranger en tant que professeur associé. Les champs de lavande entourant la propriété. Le berceau. Le silence. Puis le visage de ses parents. Les larmes sur le visage de sa mère. La douleur.

Mais cette fois, les rêves s’étaient mêlés à d’autres, plus difficilement compréhensibles.

La maison victorienne se distinguait à peine à travers la pluie battante. De la lumière jaillissait d’une des fenêtres ; le reste était plongé dans le noir. Elle courait de plus en plus vite. Vers la maison, pour se protéger. N’osant regarder derrière elle. Il était toujours là, à la suivre. Les mains agrippées à ses épaules. Puis, soudain, elle écrasait ses poings contre une lourde porte en bois. Quelque chose cédait. Elle trébuchait et tombait. Dans la chaleur, la douceur, la sécurité. A la maison.

« Le bœuf mongol et le riz brun. »

La voix de la femme déchira le souvenir de son rêve. Delilah paya et prit la nourriture. Elle s’arrêta net à la porte.

Mince !

Il avait commencé à pleuvoir pour de bon. Or, elle avait laissé son parapluie à l’appartement, pensant qu’elle n’en aurait pas besoin de la journée. De plus, au lieu de choisir son trench, Delilah avait juste enfilé une veste légère, ce qui s’avérait à présent être un bien mauvais choix.

Tout le monde lui avait dit combien le temps à San Francisco pouvait être imprévisible et, à présent, elle s’en rendait compte par elle-même. Le bulletin météo n’avait pas prédit de pluie jusqu’au week-end. Pouvait-elle porter plainte contre le météorologue ? Probablement pas.

Delilah n’avait d’autre choix que de braver la pluie. Elle savait qu’elle n’était pas loin de l’appartement, seulement à trois pâtés de maisons. En longeant les immeubles, elle commença à courir le long du trottoir, tourna dans la rue suivante, puis encore une fois, au prochain pâté. L’appartement ne devait plus être loin à présent. Elle regarda autour d’elle mais, sous cette pluie battante, elle ne reconnaissait rien. L’appartement se trouvait-il encore plus loin ?

Ses vêtements étaient déjà trempés, et elle devrait se jeter sous la douche pour se réchauffer. Où diable se trouvait-elle donc ? Elle tourna au coin d’une autre rue et se retrouva dans une ruelle. L’endroit ne lui semblait pas du tout familier, mais ce n’était pas son plus gros problème, pas plus que cette pluie incessante. Non. Son plus gros problème, c’était cet homme qui se dirigeait vers elle. Même si elle ne pouvait le dévisager correctement, elle était prête à parier sa pension de retraite qu’il n’était pas là pour lui prêter un parapluie.

Son imposante silhouette se reflétait derrière lui grâce au faible éclairage d’un réverbère. La froideur de son apparence transperça Delilah, tandis qu’une légère lueur provenant d’une fenêtre éclaira son profil gauche. La cicatrice plissant sa peau n’inspirait pas confiance.

Delilah se retourna vers l’endroit d’où elle venait mais, avant qu’elle ne pût faire deux pas, une main s’abattit sur son épaule, la propulsant en arrière. Le soudain impact lui fit perdre l’équilibre. Elle glissa sur le trottoir mouillé, ses jambes se dérobant sous elle. Son dîner se répandit sur le sol, alors qu’elle se débattait pour garder son équilibre et tenter de rester debout.

De sa main, l’homme lui agrippa plus fortement l’épaule. Elle cria en essayant de s’échapper et tomba sur le trottoir, dans le même temps. Il se baissa pour l’aider à se relever et, à ce moment, Delilah retourna la tête d’un coup sec. Pour la première fois, elle put nettement voir son visage, assez pour pouvoir l’identifier si besoin était. Il était blanc, la quarantaine. La violence et l’intention de se défouler sur elle se lisaient sur son visage.

Delilah ne pouvait permettre à son agresseur de l’entraîner dans un coin sombre. La règle numéro un en stage de survie était de ne jamais laisser l’assaillant déplacer sa victime dans un autre endroit. Elle devait le repousser ici, où elle avait une chance d’attirer l’attention d’un passant.

Autant rêver !

Avec cette pluie, personne ne mettrait le nez dehors, pas même un chien.

Après avoir relâché la prise sur son épaule, l’homme la releva en la saisissant par le col de sa veste. Rapidement, Delilah tendit les bras en arrière et s’extirpa de cette dernière, abandonnant le vêtement, désormais vide, entre les mains de l’agresseur. A présent, elle avait une chance de le battre.

Elle l’avait surpris et avait quelques secondes d’avance sur lui. Avoir couru le sprint à l’université s’avéra utile, bien que le sol glissant n’aidât pas, pas plus que les talons hauts de ses chaussures. Un de ces jours, la vanité la tuerait.

A grandes foulées, Delilah courut vers la rue voisine, ses jambes maigres, mais musclées, repoussant le sol avec une véhémence assez surprenante pour son petit corps. L’homme n’était pas loin derrière elle. Et il était plus rapide. Elle devait courir de toutes ses forces. Sa respiration s’accéléra, alors que ses poumons demandaient plus d’oxygène.

Scannant la rue, elle repéra plusieurs maisons victoriennes de l’autre côté. Toutes étaient plongées dans le noir, sauf une. La lumière allumée à travers les fenêtres de la pièce de devant lui sembla étrangement familière. C’était sa chance, probablement la seule. Ne ralentissant pas une seule seconde, elle traversa la rue étroite, escalada les quelques marches de la vieille demeure et tambourina à la porte.

« Au secours ! Aidez-moi ! »

Désespérée, elle regarda derrière elle tout en continuant à frapper des poings. Son poursuivant se trouvait à moins d’un demi-pâté de maisons et, alors qu’il se rapprochait, Delilah voyait son visage ravagé par la colère. S’il l’atteignait, il libérerait son ire sur elle, et elle n’aurait nulle part où courir.

DEUX

 

Qui diable tambourinait ? Samson devait apprendre à ses amis les bonnes manières. Il réalisa qu’il pleuvait des cordes dehors, mais ce n’était pas une raison pour abîmer sa porte, et ils risquaient de le regretter d’ici peu. Il était d’une humeur massacrante et, les entendre s’annoncer tels des barbares, ne lui plaisait pas.

Samson ouvrit grand la porte.

« Allez-vous faire foutre ! »

Un corps frêle aux cheveux dégoulinants et aux vêtements trempés tomba dans ses bras.

« Aidez-moi, s’il vous plaît ! »

La voix féminine était empreinte d’une urgence qu’il ne pouvait ignorer. Instinctivement, il la tira à l’intérieur et claqua la porte.

« Merci. »

Le faible marmonnement était presque inaudible, mais on y devinait un soulagement sincère. La jeune femme leva la tête et le regarda. De grands yeux verts, de longs cils épais et des lèvres rouges, pulpeuses. Sa chemise blanche était trempée, et elle aurait pu gagner haut la main n’importe quel concours de tee-shirts mouillés. Bien que Samson n’eût jamais assisté à un tel événement. Son soutien-gorge noir en dentelle mettait ses seins en évidence : 90C, devina-t-il.

La strip-teaseuse !

Bien sûr, c’était la strip-teaseuse. Les gars lui avaient donc trouvé une strip-teaseuse qui jouait les demoiselles en détresse. Cela changeait de l’habituelle femme policier ou de l’infirmière, mais bon, cela ne marcherait pas davantage.

La dernière fois que ses amis l’avaient surpris avec une strip-teaseuse, la Vilaine Policière avait tenté une fouille corporelle sur lui, mais l’avait laissé de marbre. Pas même les prémisses coquins d’un peu de bondage n’avaient sorti son engin de son sommeil de plomb. Qu’est-ce qui laissait Ricky penser que cette demoiselle en détresse ferait mieux ?

Elle était plus jolie, presque innocente. Samson pouvait toujours jouer quelques minutes et voir si quelque chose bougeait. Sans pour autant trop espérer, bien sûr.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? »

Elle sentait le chien mouillé, mais également une autre odeur qu’il ne pouvait identifier.

« Un homme m’a agressée. »

Elle s’arrêta pour reprendre son souffle.

« Il faut que j’appelle la police. »

Elle frissonnait, paraissait crédible. La fille avait manifestement suivi des cours de comédie.

Bien joué.

« Eh bien pourquoi ne pas vous réchauffer d’abord, en enlevant vos vêtements trempés ? »

C’était sûrement le scénario qu’elle avait en tête. Quelle meilleure raison d’enlever ses vêtements que prétexter qu’ils étaient mouillés ? Cela ne dérangerait pas Samson de la réchauffer. Avec son propre corps.

Un froncement de sourcils apparut.

« Juste un coup de téléphone, s’il vous plaît. Je peux me changer chez moi, merci. »

Ah, donc elle voulait jouer la réservée. Cela lui était égal. Samson lui indiqua le salon, dans la cheminée duquel un feu se consumait. Elle se plaça juste en face de ce dernier et tendit les mains vers la source de chaleur. Ses vêtements trempés collaient à son corps, soulignant ses formes appétissantes. Mensurations parfaites. Pas trop mince, juste assez de chair afin qu’il pût s’y plonger. Au moins Ricky avait-il choisi quelqu’un qui lui plaisait physiquement. C’était un début.

« Vous allez attraper froid dans ces vêtements trempés, » murmura-t-il dans son dos.

Les épaules de la jeune femme se dressèrent, en proie à une tension évidente. Elle ne l’avait manifestement pas senti approcher. Qu’est-ce qui clochait avec ses sens ? Alors qu’il lui enveloppait les épaules de ses mains, elle poussa un cri et se retourna aussitôt. Samson reconnut, dans ses yeux, un mélange de colère et de peur.

« Je dois y aller. »

C’était maintenant que cela devenait intéressant. Elle jouait la difficile. Ricky avait raison, elle était douée. Peut-être pourrait-elle réveiller quelque chose en lui, simple éventualité. Samson appréciait une bonne chasse autant que n’importe quel autre vampire. Et il n’avait pas chassé depuis un bon moment. Chaque femme lui avait pratiquement été apportée sur un plateau d’argent et, bien que toutes séduisantes, aucune n’était parvenue à l’exciter.

« Pas si vite. Je crois que vous oubliez la raison pour laquelle vous êtes venue ici en premier lieu. Voyons ce que vous avez à me proposer. »

Il lui faisait comprendre qu’il était d’accord pour jouer. Histoire de.

La demoiselle lui lança un nouveau regard effrayé et se dirigea vers la porte. Mais Samson fut plus rapide et lui coupa la route. Il s’amusait, à présent. En fait, cela faisait longtemps qu’il ne s’était pas autant amusé. Quoi que Ricky l’eût payée, elle valait bien chaque dollar.

La jeune femme respirait bruyamment, feignant toujours d’être effrayée. Samson pouvait presque sentir sa peur. C’était exactement de cette façon qu’il aimait sa proie. Ses mains plongèrent sur ses épaules, et il l’attira vers lui. Peu lui importait que ses vêtements trempés pussent abîmer son pull et son pantalon, lesquels ne toléraient que le nettoyage à sec.

« Non, laissez-moi partir ! »

Sa demande désespérée résonna en écho dans la vaste demeure.

« Vous ne voulez pas partir. »

Il se noya dans son parfum. Oui, le chien mouillé, mais également autre chose, une odeur différente. Cette petite diablesse de vampire utilisait-elle quelque fragrance exotique ? Ça sentait délicieusement bon, c’était tentant. Une légère odeur de lavande s’engouffra dans ses narines.

Les yeux terrifiés de la jeune femme le regardèrent, tandis qu’elle se débattait sous son emprise.

« Je suis sûr que Ricky vous a payée assez et, si ce n’est pas le cas, je vous donnerai un généreux pourboire. »

L’argent n’était pas un problème. Si elle pouvait faire quelque chose pour lui, il serait bien plus que généreux.

« M’a payée ? »

Sa voix s’étrangla dans un cri haut-perché ; ses yeux s’écarquillèrent sous l’effet de la panique. De beaux yeux, dont le vert brillait à travers des centaines de facettes différentes.

Le goujat ne l’avait pas encore payée ? Bon, il pourrait s’en occuper plus tard, mais pour le moment, Samson désirait tout autre chose : un petit goût des lèvres pulpeuses et de la langue acérée de la jeune femme.

Elle avait quelque chose de spécial. Elle avait éveillé son intérêt. Samson baissa la tête et pressa ses lèvres contre les siennes. Elle essaya de se défaire de son étreinte, mais sa tentative ne pouvait être plus fragile. Il avait connu des vampires féminins presqu’aussi forts que des vampires masculins, mais le spécimen dans ses bras avait manifestement décidé de ne pas utiliser sa force contre lui.

Ses lèvres étaient douces, délicieusement douces. Samson glissa sa main derrière sa nuque pour la maintenir en place, tout en utilisant sa langue pour tenter de lui faire ouvrir la bouche. Il voulait la goûter, lui sentir la langue, mais elle gardait les lèvres fermement closes, apparemment disposée à ne pas céder de si tôt.

Elle se débattait toujours, essayant de se libérer de son emprise. Cela lui importait peu. De fait, plus elle résistait, plus il sentait son corps se frotter contre le sien, et plus il la voulait. Il continua son assaut sur ses lèvres, les balayant de sa langue humide. Il la serra plus fortement contre lui, son autre main courant le long de son dos pour aller serrer ses jolies petites fesses. Il sentit la chaleur de son corps sous ses vêtements trempés.

Ses seins étaient écrasés contre sa poitrine, et les battements rapides de son cœur se répercutaient en lui. Il appréciait sa douceur inhabituelle. Puis, il remarqua autre chose. Il se sentit réagir face à elle. Le sang se mit soudainement à pomper dans ses parties et surgit dans sa verge. Son pantalon le serra de manière inconfortable. Mais il n’allait pas se plaindre.

Samson laissa échapper un gémissement de plaisir lorsqu’il sentit son sexe se presser contre l’estomac de la jeune femme. Elle devait probablement le sentir également. Il n’avait pas eu d’érection depuis si longtemps que la preuve que son vieux corps fonctionnait toujours fut un cadeau d’anniversaire auquel il ne s’était pas attendu. La main sur les fesses de la belle, il l’attira plus près de lui et plaça son engin contre elle, la laissant savoir qu’elle avait accompli l’impossible.

Il la récompenserait largement pour ça. Pourquoi son psy n’y avait-il pas pensé ? Tout ce dont il avait besoin, c’était d’une femme qui prétendrait ne pas le désirer, et ses instincts de chasseur se feraient sentir. La psychologie inversée, là se trouvait la solution. Il devrait virer Drake. Durant tous ces mois, le charlatan n’avait rien trouvé qui pût l’aider.

Soudain, les lèvres de la strip-teaseuse s’écartèrent, et il n’hésita pas une seconde à y glisser sa langue avec avidité.

Oh bon dieu, oui !

Sa bouche, sa saveur, tout était tellement différent de ce qu’il avait pu goûter jusque-là. Sa langue s’engouffra en profondeur, cherchant celle de la femme. Ce n’était pas ce à quoi Samson s’était attendu ; son corps se tendit, alors qu’il explorait cette bouche délicieuse et jouait avec la langue hésitante, taquinant la jeune femme pour qu’elle lui en donnât davantage. Il y mit encore plus d’engouement. Oh bon sang, elle était délicieuse.

La main sur sa nuque, Samson la caressa avidement, tandis que son autre main ne pouvait cesser de caresser ses fesses et de la serrer plus fort encore contre lui. Sa verge était dure comme de la pierre et prête à exploser. Il ne pouvait se souvenir avoir jamais eu une telle érection ou, en tout cas, pas au court des cent cinquante dernières années.

Il n’y avait pas moyen qu’il la laissât partir avant de l’avoir complètement possédée. Il voulait s’enfoncer en elle aussi longtemps que possible et trouver le plaisir qui lui avait fait défaut ces neuf derniers mois.

Samson avala davantage encore de son goût, de son odeur, et tout d’un coup, ses narines frémirent.

Que diable était-il en train de faire ?

Merde !

Il n’était pas en train d’embrasser un vampire. Elle avait un goût humain ! Ses amis étaient en train de le tuer. Ils lui avaient dégoté une strip-teaseuse humaine ! Ils auraient au moins pu le prévenir. Il risquait de lui faire mal s’il ne faisait pas attention. S’il perdait le contrôle, il pouvait la mordre et boire son sang. Quelle bande d’idiots !

Alors, il sentit la douleur, aiguë, le poignardant par surprise dans son pied. Il lâcha immédiatement la jeune femme et grimaça, sautant sur un pied pour tenter d’atténuer la douleur. Elle avait enfoncé, de toutes ses forces, son talon aiguille dans sa chaussure italienne.

C’était quoi, ce bordel ?

Qu’est-ce qui lui avait pris ? Elle avait répondu à son baiser, elle l’avait embrassé. Il n’y avait aucune raison à son brusque éclat de colère. En outre, Ricky avait dit qu’elle faisait quelques extras. Alors qu’il la dévisageait, incrédule, elle le regarda furieusement et, comme si cela ne suffisait pas, le gifla d’un coup sec sur la joue.

Bam !

Des rires étouffés dans son dos firent se retourner Samson en un temps record. Enfin, ils étaient là : ses amis, le regardant se faire taper par une femme. Cela irait droit dans les livres d’Histoire : la nuit où Samson s’était fait gifler par une humaine. Y avait-il autre chose de prévu pour son humiliation ?

« Bon sang, mais qu’est-ce que tu fous, Samson ? » demanda Ricky.

« Qu’est-ce que tu crois que je suis en train de faire ? Je m’amuse avec la strip-teaseuse que tu m’as offerte pour mon anniversaire. »

Depuis quand Ricky était-il guindé ? Après tout, cette idée ridicule était la sienne.

« Une strip-teaseuse ? » hurla la femme. « Je ne suis pas une strip-teaseuse ! »

Ricky secoua la tête, et les gars derrière lui ne purent retenir leurs stupides sourires, comme s’ils n’étaient qu’une bande de gamins à l’université et non pas des vampires adultes.

« T’es aveugle, mec ? Ce n’est pas la strip-teaseuse. »

Ricky inclina la tête en direction de la femme à la courte tenue d’infirmière et aux porte-jarretelles se tenant au milieu de ses amis. Les yeux de Samson passèrent de l’infirmière à la demoiselle en détresse, telle une balle de ping-pong, pour finalement s’arrêter sur Ricky. La vérité se lisait sur le visage, choqué, de ce rouquin de vampire.

« Ça…, » dit Ricky en pointant du doigt la femme furieuse à côté de Samson, « c’est une dame clairement énervée à qui tu dois des excuses. Je me mettrais à genoux tout de suite si j’étais toi. »

Bon conseil. Samson grimaça intérieurement.

« Joyeux anniversaire, » dit son plus vieil ami, Amaury.

S’il était en train d’essayer d’apaiser la situation, alors il fallait y mettre plus de conviction, car cela ne fonctionnait absolument pas.

« Et félicitations, » ajouta Thomas en souriant.

Mais ce n’était pas pour son anniversaire qu’il le félicitait. Ses yeux étaient fixés sur l’entrejambes de Samson. Rien ne pouvait jamais échapper aux yeux vifs de Thomas, surtout lorsqu’il s’agissait d’un corps masculin. Samson comprit immédiatement, mais cela ne détendit pas l’atmosphère pour autant. A présent, il devait faire face à la femme qu’il avait embrassée si passionnément, et cela ne le mettait pas à l’aise. Surtout au vu de l’ardente et protubérante érection sous son pantalon. Une érection qui ne disparaîtrait pas, pas tant qu’il aurait le goût de la jeune femme sur la langue.

Celle-ci l’effleura en passant pour sortir de la pièce. Il ne pouvait la laisser partir ainsi. Il lui devait bien plus que des excuses. Elle avait apaisé ce que son psy n’avait pas été capable de régler après des mois de rendez-vous hebdomadaires. Il devait faire quelque chose, n’importe quoi.

« Mademoiselle... »

Elle continua à marcher, comme si elle ne l’avait pas entendu. Les gars s’écartèrent pour la laisser passer.

« S’il vous plaît. Je suis désolé. Je ne savais pas. Je pensais que vous étiez… Je suis désolé. Vous devez penser que je suis un sauvage. S’il vous plaît, mademoiselle, laissez-moi vous offrir des vêtements secs, quelque chose pour vous réchauffer. Mon chauffeur va vous ramener chez vous. »

Elle s’arrêta sur le pas de la porte et sembla hésiter.

« S’il vous plaît. »

Peu lui importait que ses amis pussent le voir en train de la supplier. Il les affronterait plus tard. Etonnamment, tout ce qu’il voulait pour le moment, c’était qu’elle ne fût pas en colère contre lui. Samson ne comprenait même pas pourquoi cela lui importait ; après tout, ce n’était qu’une humaine. Finalement, les épaules de la jeune femme semblèrent s’affaisser, comme si elles se relâchaient sous le poids de la tension.

***

Delilah se retourna et le regarda. Elle savait qu’il pleuvait toujours dehors, et la perspective de vêtements secs et de quelqu’un qui la raccompagnerait chez elle était tentante, d’autant qu’elle n’était pas sûre de retrouver le chemin de son appartement. En outre, le voyou pouvait toujours rôder dehors, dans les parages et alors, elle ne serait pas mieux là-bas qu’auparavant.

Maintenant qu’il la regardait avec ses yeux de chien battu, l’homme semblait accueillant et gentil. Ce n’était pas l’impression qu’il avait donnée quelques minutes auparavant. Elle s’était sentie comme sa proie. Il avait semblé être un chasseur. Son baiser, avide et chaud, était empreint d’expérience. Et malheureusement, c’était ce qui lui avait plu. Raison pour laquelle elle n’avait pu résister et l’avait, à son tour, embrassé.