Belkacem_HeritageCoran_couv_V02.jpg

Djebari Belkacem

Réflexion sur le partage de l’héritage selon le Coran

Préface

L’idée de réfléchir au partage de l’héritage relève d’une préoccupation personnelle visant un objectif noble qu’Allah nous a recommandé d’atteindre dans son livre saint qui consiste à faire des recherches (« tadabor ») pour découvrir la vérité.

Il nous a aussi recommandé de faire des bonnes œuvres qui permettront d’épanouir l’être humain et l’ensemble de la société dans laquelle nous évoluons. Cette recommandation a été répétée cinquante fois dans le Saint Coran : « Les croyants qui font les bonnes œuvres ». Ceux-là vivent dans le bonheur et la prospérité grâce à une énergie divine qui leur donne goût à la vie.

Il s’agit donc de laisser une œuvre utile dans ce bas monde à nos générations futures.

Introduction

L’héritage a connu durant des siècles des interprétations différentes qui n’ont pas abouti à un partage juste comme Allah l’a prescrit dans son livre saint. Pourtant, les versets coraniques sont clairs et non entachés d’erreurs ou de confusion dans lesquels Allah a positionné des garde-fous qui permettent d’éviter des débordements, suite à des interprétations douteuses ou orientées à des fins basées sur des intérêts personnels.

Beaucoup d’esprits n’acceptent pas que la femme obtienne une part égale ou supérieure à celle de l’homme pour des raisons familiales, tribales et bien plus.

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’il s’agit de textes de partage divins immuables dans leur contenu jusqu’à l’éternité et qu’aucun humain sur terre ne peut les modifier. Ces textes s’imposent aux gens pieux qui les appliquent en ayant dans l’esprit qu’Allah les regarde comme le Prophète Mohamed SAS l’a expliqué dans son entretien avec l’Ange Gabriel SSL sur la vertu (« el-ihsane »).

Sachant que l’interprétation provient d’un humain, elle peut être inexacte ou inadaptée dans le futur parce que l’interprétateur n’a pu mettre en évidence des éléments essentiels qui n’étaient pas en sa possession et que des siècles plus tard d’autres les ont découverts. Donc on ne peut s’attacher à dire que les anciens ont interprété les textes coraniques, il n’y a pas lieu de les remettre en cause.

Bien au contraire, une relecture des textes coraniques par une approche scientifique et logique doit être faite pour apporter le complément nécessaire à une lecture du passé qui était valable, mais souffre d’une insuffisance dans le siècle actuel.

La réflexion développée à travers ce livre permet de constater que deux termes n’ont pas été compris, ou bien des circonstances particulières à travers une dizaine de siècles écoulés ont conduit ou contraint nos savants à interpréter les textes coraniques et particulièrement le verset 11 du chapitre « Les femmes » pour aboutir et instaurer le partage actuel de l’héritage qui avantage ouvertement et injustement le sexe masculin au détriment du sexe féminin.

Les deux termes en question constituent les éléments clés et essentiels pour opérer au partage de l’héritage entre les héritiers descendants (enfants) principalement, et les héritiers du second degré accessoirement dans le même sillage de l’interprétation adoptée.

Cette interprétation a abouti à un partage de l’héritage entre les héritiers par individu et non par groupes indépendants l’un de l’autre, alors que dans le verset 7 du chapitre « Les femmes », Allah a prescrit un partage par groupe de sexe.

Ainsi, Allah dans le Coran a prescrit deux méthodes de partage de l’héritage, à savoir :

Une méthode de partage par scénarios pour départager les deux sexes masculin et féminin ; ce partage est assis sur le nombre de femmes composant le groupe du sexe féminin qui évolue de 1 ou 2 ou plus ;

Une méthode de partage égalitaire ; ce partage se fait au sein de chaque groupe sans confondre les deux sexes ; il se fait aussi en dehors des groupes en confondant les deux sexes comme le prescrit le verset 12 du chapitre « Les femmes » pour partager le 1/3 revenant aux héritiers de second degré.

Dans ce cas, la méthode du partage égalitaire est la règle générale. Les héritiers peuvent décider d’un partage non égalitaire au sein d’un groupe consentant. La proportion revenant aux deux sexes confondus sur la base de la méthode du partage égalitaire est fixée avec précision par Allah.

Lorsque la proportion allouée aux héritiers est différente du tiers, il est fait recours à la méthode de partage par scénarios prescrite par le verset 176 du chapitre « Les femmes ».

Les termes essentiels qui constituent la clé du partage de l’héritage sont :

« dhakar » qui signifie un groupe (un ou plusieurs) et non un individu du sexe masculin ; et

« oualad » qui signifie un enfant des deux sexes et pas forcément masculin.

Il sera démontré, à travers ce qui a été développé, dans ce livre :

que le partage actuel de l’héritage ne répond pas à la véracité des textes coraniques qu’Allah a prescrit dans le chapitre « Les femmes », et notamment ses versets 7, 11, 12 et 176 ; et

qu’une confusion, entre un scénario de départ qui consiste à allouer la moitié (1/2) pour le groupe du sexe féminin composé de deux individus et l’autre moitié au groupe de sexe masculin qui pourrait être constitué d’un ou plusieurs individus ; avec un rapport de partage qui permet d’octroyer injustement une part double à un individu de sexe masculin.

Une autre injustice a été commise, notamment envers les parents biologiques en abrogeant (par un hadith du prophète Mohamed SAS) le testament qui leur permet d’obtenir une part de l’héritage lorsqu’ils n’auront pas adopté le défunt (ou la défunte). Là aussi, il y a eu confusion entre le parent biologique et le parent adoptif du défunt ou de la défunte. Le parent adoptif du défunt ou de la défunte est seul héritier selon les prescriptions du verset 11 du chapitre « Les femmes ». Lorsque les parents biologiques sont aussi ceux qui ont adopté le défunt ou la défunte, ils héritent simultanément par le testament et par les dispositions des versets 11 du chapitre « Les femmes ».

Une relecture du texte coranique basée sur une approche faisant appel à la raison et au bon sens est ainsi tout indiquée pour comprendre ce qu’Allah a prescrit dans son livre saint. En effet, Allah a dit dans le verset 83 du chapitre « Les femmes » :

« Ne peuvent comprendre le Coran que ceux qui font recours à la science de la déduction… ».

Le terme déduction signifie en arabe « el-istinbat ».

La réflexion présentée dans ce livre est assise sur les textes coraniques qui constituent la source essentielle du partage de l’héritage. La compréhension de ces textes coraniques est confortée par la présentation et le développement des points ci-après :

l’approche retenue ;

la méthodologie de partage qui permet de cerner d’une manière précise et exhaustive la part globale des héritiers enfants du défunt ou (défunte) et des héritiers frères et sœurs (du deuxième degré) ;

l’étude du partage actuel de l’héritage ;

le partage de l’héritage selon l’esprit des textes coraniques ; et

l’étude comparée entre le partage actuel et le partage selon l’esprit des textes coraniques.

Pour étayer cette réflexion sur les textes coraniques régissant le partage de l’héritage, le recours à des éléments, chiffrés comparables et illustrés par des graphiques et des schémas assortis de commentaires, a été fait.

Les graphiques et schémas ci-après ont été à cet effet tracés :

Schéma de l’interdépendance explicative entre les trois scénarios de partage prescrite par le verset 11 du chapitre « Les femmes ».

Graphique du partage dans le 1er scénario ;

Graphique du partage dans le 2e scénario (plus de 2 individus de sexe féminin) ;

Graphique du partage dans le 3e scénario (un individu de sexe féminin) ;

Schéma de partage (1) entre les enfants héritiers au premier degré ;

Schéma de partage (2) au profit du père du défunt ou de la défunte au premier degré ;

Schéma de partage (3) au profit de la mère du défunt ou de la défunte au premier degré ;

Schéma de partage (4) au profit de l’épouse du défunt au premier degré ;

Schéma de partage (5) au profit de l’époux de la défunte au premier degré ;

Schéma de partage (6) au profit des enfants héritiers de sexe masculin en l’absence du sexe féminin ;

Schéma de partage (7) au profit des enfants héritiers de sexe féminin en l’absence du sexe masculin.

SAS* signifie : Salut d’Allah et Satisfaction.

SSL* signifie : Salut Soit Sur Lui.

I. Textes coraniques de référence

Le partage de l’héritage est prescrit par les chapitres « La vache » 180 et 181 et « Les femmes » versets 7, 11,12 et 176. Ces versets prescrivent ce qui suit :

Verset 180 du chapitre « La vache » :

Ce verset prescrit la « ouassia » ou testament aux parents biologiques du défunt ou de la défunte ainsi que leurs proches puisqu’il stipule :

« Il vous est prescrit lorsque l’un d’entre vous est au chevet de la mort et s’il laisse une fortune, un testament à ses parents biologiques et à ses proches s’il juge qu’ils sont nécessairement dans le besoin : un devoir pour les pieux. »

Verset 181 du chapitre « La vache » :

Ce verset s’adresse aux exécuteurs du testament puisqu’il prescrit ce qui suit :

« Quiconque aurait changé le contenu du testament après l’avoir entendu alors la faute incombera à ceux qui l’ont changé ; Allah écoute et le saurait. »

Il est le garant de l’exécution du testament après la mort du testateur.

Verset 7 du chapitre « Les femmes » :

Ce verset prescrit un partage de l’héritage par groupe de sexe puisqu’il stipule :

« Aux hommes leur proportion de l’héritage laissé par les parents biologiques et les proches ; et aux femmes leur proportion de l’héritage laissé par les parents biologiques et les proches, peu ou grande soit-elle ; une proportion est obligatoire. »

Verset 11 du chapitre « Les femmes » :

Ce verset prescrit la part de l’héritage revenant aux enfants du défunt et à celle de ses parents. Voici ce que stipule le verset 11 :

« Allah vous recommande pour vos enfants. Au sexe masculin une part correspondante à celle de deux membres du sexe féminin. Si elles sont plus de deux femmes il leur sera alloué les deux tiers de l’héritage. Si elle est seule la moitié lui revient. Aux parents adoptifs pour chacun d’eux le sixième si le défunt ou la défunte a un enfant. S’il n’y a pas d’enfant et que les parents l’héritent le tiers est alloué à la mère. S’il a des frères et/ou sœurs le sixième lui revient après testament établi ou paiement d’une dette léguée … »

Verset 12 du chapitre « Les femmes » :

Ce verset prescrit la part de l’héritage laissé par les épouses à leur époux si elles venaient à décéder. À l’inverse si l’époux venait à décéder, la part laissée aux épouses. Voici ce que prescrit le verset 12 :

« Il vous est alloué la moitié de l’héritage laissé par vos épouses si elles n’ont pas d’enfant. Si elles ont un enfant vous héritez du quart après exécution d’un testament ou paiement d’une dette léguée.

Et à elles le quart de l’héritage que vous aurez laissé si vous n’avez pas d’enfant.

Si vous avez un enfant le huitième leur sera alloué après exécution d’un testament que vous aurez laissé ou le paiement d’une dette léguée.

Et si un homme ou une femme n’ayant pas d’enfants héritiers meurt en ayant une sœur ou un frère il est alloué à chacun d’eux le sixième.

Et s’ils sont plusieurs frères et sœurs, ils sont associés au tiers après exécution d’un testament que vous aurez laissé ou le paiement d’une dette léguée sans préjudice. C’est une recommandation d’Allah. Allah est omniscient et indulgent ».

Verset 176 du chapitre « Les femmes » :

Ce verset prescrit la part de l’héritage laissé par le défunt s’il n’a pas d’enfant héritier. Le partage se fera entre les héritiers du deuxième degré (frères et sœurs) à hauteur du solde restant lorsque l’épouse hérite. Ce solde est réparti entre les héritiers frères et sœurs selon les scénarios de partage prescrit par le verset 176. Voici ce que prescrit le verset 176 :

le verset 7 est placé avant pour expliquer que le partage se fait par groupe ; il explique le terme «  » implicitement ;

le verset 11 entame directement le partage par groupe entre les enfants puisque :

-le début du verset nous fait comprendre que le partage s’effectue en présence des deux sexes ;

-lorsque l’un des deux sexes est absent il laisse déduire que le vivant bénéficie de l’intégralité de la part des enfants.

le verset 12 gère la part de l’époux ou de l’épouse en présence ou en l’absence d’enfants ;

l’enchaînement du partage de 2e degré en l’absence d’enfants héritiers en fixant le 1/6 pour une sœur ou un frère et 1/3 dans lequel ils sont associés s’ils étaient plusieurs frères et sœurs ;

Les versets 12 et 176 gèrent le partage de l’héritage entre les héritiers du deuxième degré en l’absence d’enfants héritiers en prescrivant :

-Un partage égalitaire ; et

-Un partage par scénario du solde restant lorsque les parents, l’épouse et frères et sœurs héritent.

Remarque :

Tous les versets énumérés originaux

en arabe se trouvent en annexe.